Publiée le 21/03/2018

Mesdames et Messieurs les pensionnés, La Cour !

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C’est de la cour administrative de Versailles que l’on parle.
Elle a fait sa rentrée solennelle, comme le tribunal administratif de cette même royale ville, le 5 février 2018 et, à cette occasion, les deux présidents de ces juridictions ont, comme il est d’usage, prononcé, chacun, un discours qu’il faut lire pour savoir ce qui attend les pensionnés devant les « juridictions administratives de droit commun », auxquelles le contentieux des PMI risque d’être transféré, sans ménagement, à partir du 1er janvier 2019, si la LPM 2019-2025 est votée sans amendements.

Le transfert du contentieux PMI se décide, en effet, ces jours-ci dans l’hémicycle (séances publiques de l’Assemblée nationale des 20, 21 et 22 mars 2018) !

La discussion autour de la LPM 2019-2025 qui prévoit en son article 32 de transférer le contentieux des PMI aux juridictions administratives de droit commun, a donc commencé.

Si vous voulez savoir à « quelle sauce » les pensionnés seront « mangés » par ces juridictions administratives de droit commun que l’on nous a tant vantées ces dernières semaines (pour mieux nous les « vendre clefs en main »), je vous invite à lire ces deux discours de « rentrée solennelle » des cour administrative et tribunal administratif de Versailles.

Je n’inventais donc rien ! (Cf. la lettre ouverte aux représentants de la Nation et le dossier PMI publiés par l’ASAF)

Afin de vous faciliter la lecture de ces deux discours, j’en ai surligné en jaune les passages les plus révélateurs et me propose de vous les commenter et décrypter, aussi brièvement et simplement que possible.

Les belles incantations d’abord :

« En France, la justice respire à deux poumons… les ordres judiciaire et administratif travaillent en parfaite intelligence. » : C’est si vrai que les seules juridictions véritablement mixtes, les juridictions spéciales des pensions, vont être supprimées, principalement en raison de leur caractère hybride… faisant que et l’ordre administratif et l’ordre judiciaire les ont négligées, voire même ignorées jusqu’à les rendre moribondes.

« Les avocats, beaucoup moins auxiliaires que partenaires de justice » : C’est certainement pour cela que l’administration a tenté de les maintenir à distance de cette réforme du contentieux des PMI et que, pour diaboliser ceux qui ont osé s’en mêler quand même, elle a écrit qu’ils répandaient des « fake news » et qu’ils se battaient beaucoup plus pour leur « fonds de commerce », que dans l’intérêt des pensionnés. C’est tellement incongru quand on sait qu’ils sont rémunérés par l’État au titre de l’aide juridictionnelle (laquelle est de droit en matière de PMI) environ 450 € pour un contentieux PMI (pouvant durer jusqu’à 31 ans exceptionnellement, et classiquement entre 6 ans 10 ans).

Le traitement des contentieux relevant déjà de ces « juridictions administratives de droit commun :

Le délicieux camembert des activités 2017 de la CAA de Versailles, nous révèle que notre « malheureux petit contentieux PMI » prendra place parmi les 25% de « divers » (contentieux sociaux (PSE), l’urbanisme, l’environnement et la fonction publique), puisque 50% de l’activité de cette cour sont « monopolisés » par le « droit des étrangers » et les 25% restant, par le « contentieux fiscal ».

Et on voit bien que les magistrats administratifs travaillent eux aussi à flux tendus, alors qu’on nous avait assurés du contraire : « La difficulté- hélas réelle mais que j’espère temporaire- à équilibrer nos flux et à diminuer notre stock d’affaires de plus de deux ans est due pour partie à des tensions sur nos effectifs de rapporteurs, ainsi qu’à des facteurs certes quantitatifs mais aussi qualitatifs, notamment la complexité croissante de certains contentieux. ». Alors, me direz-vous « Versailles n’est pas la France » ! Non mais Versailles est l’une des 8 cours administratives d’appel qui devra absorber, dès le 1er janvier 2019, les affaires pendantes devant plusieurs des 37 cours régionales des pensions qui sont appelées à disparaître. Encore un « stock » qui viendra s’ajouter au « stock »…on connaît la chose en PMI ! La sous-direction des pensions n’a quant à elle toujours pas digéré un stock de près de 6000 dossiers lié à la disparition des DIAC (2011). 

Ah ! Mais non, c’est une « fake news » ça ! C’est sans compter le remède miraculeux des ordonnances de l’article R. 222-1 du CJA !

Citons, d’abord, le président de la CAA : « La situation a été, au moins pour partie préservée de la dégradation grâce à la hausse du nombre d’ordonnances... Grâce à une réflexion collective dont j’espère qu’elle aboutira bientôt, le recours à la procédure des ordonnances de l’article R. 222-1 dernier alinéa du code de justice administrative devrait donc être élargi cette année. »

Je vous laisse découvrir par vous-même les beautés de cet article R. 222-1 et vous invitant à imaginer le pensionné livré, seul, devant ces subtilités procédurales extraordinaires.

Si votre curiosité vous a conduit à lire aussi le discours de la présidente du TA (de Versailles) vous aurez constaté que ce qui vaut pour la CAA, vaut aussi en première instance (taux de requêtes en instance depuis plus de 2 ans : 17%, les affaires d’étrangers en forte augmentation, l’obligation de recourir à la médiation…).

Alors est-il vraiment, comme on nous l’affirme, de l’intérêt des Blessés pour la France de traiter ainsi leur contentieux « spécial », alors qu’ils relèvent d’un des seuls codes de souveraineté édictés en France ?

Ils sont les créanciers de la France ! Ils ont des droits sur nous ! Ils ne peuvent être jugés de la sorte, à la sauvette, entre deux étrangers et un permis de construire.

C’est à ces questions que nos députés doivent répondre par un vote imminent, qui -nous osons encore l’espérer- conduira au retrait des articles 32 et 36 de cette LPM 2019-2025 dans laquelle ils n’ont pas leur place (Cf. la lettre ouverte aux représentants de la Nation et le dossier PMI publiés par l’ASAF).

Actualité rédigée par Véronique de Tienda-Jouhet le 21/03/2018 à 12h08